Robin des Bois va devoir ressortir son arc et ses flèches. Et pour cause : sa célèbre forêt de Sherwood se retrouve menacée par un groupe pétrochimique désireux d’y lancer l’extraction de gaz de schiste. En vrai renard qu’il est, Robin ne l’entend surement pas de cette oreille.
Outre-Manche, l’exploitation du gaz de schiste peut, depuis plusieurs années, compter sur le soutien sans faille des gouvernements conservateurs successifs. Et quand on leur donne l’aval, les sociétés pétrochimiques en profitent comme jamais. Sauf que cette fois, l’une d’entre elles a décidé de s’attaquer à un lieu peut-être un peu trop symbolique. Dans le comté de Nottinghamshire, la célèbre forêt de Sherwood, à jamais associée au rusé Robin des Bois, recèle quelques puits de pétrole.
Il y a quelques jours, la branche anglaise des Amis de la Terre, ONG engagée dans la protection environnementale, annonçait que le groupe pétrochimique britannique Ineos allait lancer des mesures de prospection sismique dans la jungle de Sherwood. Autrement dit, l’analyse des échos d’ondes sismiques créées par des camions vibreurs pour visualiser en profondeur les structures géologiques. Il s’agit ici de la première étape avant la fracturation hydraulique, très controversée méthode controversée consistant à injecter, en profondeur et à forte pression, un mélange d’eau et de produits chimiques accompagnés de sable pour libérer du gaz contenu dans de la roche de schiste.
Le Major Oak, l’arbre qui cache la forêt
Sauf qu’on ne touche pas à la forêt de "Robin la capuche" et encore moins au Major Oak, ce chêne quasi-millénaire qui aurait, selon la légende, abriter notre fidèle justiciers et sa troupe de gais lurons. Déjà fortement fragilisé, le précieux arbre a aujourd’hui plusieurs de ses branches soutenues par des tuteurs afin d’éviter qu’elles ne s’affaissent sous leur poids. On parle quand même d’un conifère qui s’est vu décerner le célébrissime prix d’ "arbre de l’année" en Angleterre en 2014 (on vous promet que ça n’est pas une blague).
Est-ce que rien n’est sacré ? […] Ineos semble avoir retenu de Robin des Bois un message différent de nous
L’angle de défense des militants écologistes est donc tout trouvé. Alors que les tensions liées à l’opposition au gaz de schiste dans la région des Midlands de l’Est - voire au-delà - se ravivent, une pétition invectivant Andrea Leadsom, la ministre de l’énergie de Theresa May, de "ne pas autoriser l’exploration du gaz de schiste dans la forêt de Sherwood ou toute autre forêt publique" vient d’être mise en ligne.
Il s’agit au contraire d’une alternative respectueuse de l’environnement. Il serait tout simplement fou de ne pas exploiter cette ressource naturelle (…). Toute décision de construire un puits prendra en compte des caractéristiques environnementales comme le Major Oak
Si le ton affiché est évidemment différent du côté d’Ineos, un rapport de plus de 1 000 pages publié par l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA) vient contrecarrer les affirmations de la société. D’après l’étude, l’extraction des gaz de schiste par fracturation hydraulique pouvait avoir un impact néfaste sur la qualité et la disponibilité des ressources en eau potable aux Etats-Unis. Un résultat renforcé par le fait que la pratique soit interdite en France depuis 2011 et même confirmée par le Conseil constitutionnel en 2013. Tremblez groupes pétrochimiques, car Robin ne se laissera pas faire. Il se murmure même qu’il compte ramener ce bon vieux chauve de Frère Tuck pour en découdre…